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le sexe et la fin

3 février 2013

chronique d'une rupture érotique

chronique d'une rupture érotique
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1 janvier 2013

J

   C'est une histoire à raconter.
   L'histoire d'une femme qui prend un homme, d'un homme qui prend une femme.

    Il y a un début.
   Ce n'est pas le premier jour, ce n'est pas le premier soir, ils sont debout, tous les deux, debout dans la chambre, près du lit. La main droite de l'homme est posée sur la hanche gauche de la femme. Sa main gauche est sur sa hanche droite.

   Lui, c'est une pièce d'homme.
   Elle aussi est assez grande : ils peuvent se regarder dans les yeux. Des feux s'allument presque aussitôt et ses mains à elles sont autour de son cou à lui et ils pourraient danser ainsi, d'ailleurs un pas s'esquisse, ils pourraient danser et personne ne trouverait rien à redire, ils se regarderaient, plongés dans le regard l'un de l'autre, un pas, puis deux, ils danseraient.

   Mais ils ne dansent pas. Ils sont face à face, presque immobiles, il sourit, elle semble attendre, ils sont face à face et pas encore collés. Ils vont se rapprocher.

   A cet instant même, à cet instant précis, tout est évidence : ils se regardent, ils se tiennent, ils s'aiment. Il la rapproche de lui, peu à peu, il l'attire vers son corps, ses bras sont moins tendus et il peut bouger les mains sur les hanches. Il caresse la camisole, le tissu vieux rose sous lequel il sent déjà la peau trembler. Elle frissonne. Ils sont très proches désormais et sa bouche, sa bouche à elle ne pourra résister bien longtemps. Elle va s'offrir, elle va faire ce don, le don toujours recommencé, elle va offrir cette bouche entrouverte qui voudrait dire, qui voudrait affirmer, mais non, rien d'articulé ne sort, juste un souffle, faible, presque un étouffement, un souffle hésitant, humide et moite, elle s'ouvre. Il prend cette bouche timidement en y apposant ses lèvres sèches d'émotion. C'est chaud et fulgurant.
   Il bande.
   Le baiser s'appuie, on dirait qu'il s'écrase, qu'il va tout ravager, mais c'est doux et suspendu et les langues se trouvent et les têtes se tournent et le jour, et la nuit, on ne sait plus, les yeux se ferment, s'ouvrent, et la terre se dérobe encore, et les langues, mon Dieu les langues !, la bouche aussi, les lèvres, et l'eau, et la respiration, deux respirations mêlées, ils s'embrassent, ils tombent, ils sont debout, pourtant ils tombent, c'est le baiser, les yeux fermés, un monde, un univers, un espace, la vie qui passe de l'un à l'autre, la vie qui fait des tours, des allers, des retours, ils s'abandonnent.
    Un gémissement.
   C'est lui. C'est son cri à lui, lâché à travers le baiser, par le ventre, le cri soupiré quand sa main à elle a quitté son cou et s'est plaqué juste un peu plus haut, si près, mais tout a basculé, sa main est venue sur ses cheveux, dans ses cheveux, doigts écartés, elle le caresse et ce n'est rien pourtant, ce n'est rien qu'une main, rien que des cheveux, mais il palpite. La caresse est enivrante et le baiser continue, rehaussé de ce goût supplémentaire. Ça n'en finit plus, ça n'en finira jamais, ça ne finira jamais. Ils s'aiment pour toujours et les mains de l'homme sont dans son dos, passent sous le tissu et la peau nue l'attendait, lui, la peau nue attendait ces mains véritables, ces mains amoureuses.

    Lover one.
   Il caresse le dos de la femme. Un dos large, presque infini, tiède et soyeux par endroit. Il explore de ses mains appuyées une terre mille fois visitée. C'est encore le frisson, et c'est encore la première fois. Combien de temps durent les premières fois ? Combien de fois va-t-il encore poser ses mains sur elle et tout découvrir ? Il n'y pense pas. Il l'embrasse, il bande, il l'aime.

   Les bouches se décollent délicatement, et l'air les pénètre, les ramène au monde et ses yeux à elle ont l'air de pleurer. Ils brillent. Elle sourit. Elle respire. Elle referme les yeux, elle repart là-bas, son jardin, son amant. Elle se laisse aller, l'offrande n'est pas achevée, et les mains de l'homme dans son dos lui disent encore des choses.

   Ses mains à elle sont revenues sur le cou; elles ne font rien, rien d'autre que le tenir, ou se tenir, se retenir pour ne pas choir déjà, résister à l'attraction du lit, les mains font durer la magie, la suspension du temps, la montée du désir. Elle se sent légère. Chaque caresse ralentit son souffle, la libère. Elle suffoque, elle halète. Elle pourrait mourir. Mais c'est de la vie qui l'envahit, de la vie et de l'amour, mêlés comme bientôt leurs corps le seront, elle voudrait que cela s'éternise, dure, dure.

   Il arrête.
   Une seconde, volée.

   Et les mains ont trouvé ce qu'elles cherchaient. Décidées, elles remontent le dos de la femme, entrainant avec elles la camisole rose. Elle l'aide en ondulant, consentante, débordante, elle lève les bras pour en finir avec ce tissu.
    Les seins !
   Généreux, accueillants, ces seins gainés dans une brassière rosée, ces seins retenus, qui veulent sortir, se livrer à l'amour.

   Elle ne voit plus rien, les bras levés, le tissu sur les yeux. Elle est aveugle, coincée, il ne retire pas complètement la camisole. Des frissons encore pour elle, ceux de la gêne, du malaise, du contrôle qui échappe toujours un peu plus. Que fait-il ? Que regarde-t-il ? Pourquoi n'en finit-il pas avec ce haut ?

    Elle n'ose plus respirer. Elle ne voit plus. Elle sent.
   Un regard sur elle, sur ses aisselles, sur son cou dégagé, sur son ventre, sur sa poitrine tendue. Il est là tout près, elle perçoit un air moite, une bise chargée qui balaye sa gorge abandonnée.

   Les bras levés, le tissu retourné sur ses yeux, elle attend, elle ne peut rien, il maintient la position. Elle ne proteste pas.
   Les seins !
  Son regard. Elle sait. Son regard ! La cicatrice. Elle sait. Au dessus du sein droit, il la regarde. Une marque blanche, une petite couture, un peu claire, striée, serrée, fripée. Une cicatrice comme un rai de lumière sur son sein. Cette cicatrice qu'elle n'avait jamais aimée, cette cicatrice qu'elle cachait, qui lui faisait honte et peur, cette cicatrice devenue sous les yeux et les mains d'un homme, la porte d'entrée du désir de tous les hommes. Une marque qui donne le ton, la profondeur des seins, le relief incroyable. Une marque qui appelle, qui attire, qui rend fou. Un aimant.
   Elle sait qu'il la regarde. Elle rougit. Ça ne se voit pas, ça ne sert à rien.
   Il finit d'enlever la camisole.
   Libre !
   Elle baisse les bras. Elle est en brassière devant l'homme qui l'aime, qui la dévore des yeux et du sourire. Elle a un peu froid pense-t-elle, elle croise ses mains sur sa poitrine, elle a un peu froid croit-elle.

   Ce n'est pas ça.
   Elle n'a pas froid.
   Mouillée.
   Elle l'a senti. Elle a bougé les jambes, les a resserrées, elle a haleté. Il se penche alors et prend délicatement le sein droit et la brassière. Il se penche encore et sa bouche est sur la cicatrice. Elle tend la tête en arrière, dégage son cou, fait de la place aux lèvres de l'homme. S'offrir encore, s'offrir toujours.
   Mon amour.
   Il embrasse timidement la peau au-dessus du sein. Un baiser petit, une langue qui lèche un peu, il l'effleure, elle se cabre davantage, qu'il continue, qu'il continue !
   Il se redresse.
   Ses mains, d'abord la gauche, se posent sur les seins, les prennent à travers le tissu un peu rêche. Elles vont sous la brassière, et à pleines mains, à pleins seins, il confie à cette femme son envie d'elle. Et c'est comme si ces seins, palpitants, fermes, au bout granuleux, c'est comme si ces seins avaient été façonnés il y a longtemps, à l'origine, par ses mains à lui. Ils sont de la taille exacte de ses paumes et de ses doigts. L'entente est parfaite.
   Elle a redressé la tête, les yeux toujours fermés elle se blottit dans le cou de l'homme. Elle gémit et une de ses mains ne peut se retenir de descendre vers ses propres cuisses. A travers la toile du pantalon elle pose ses doigts dans le creux de ses jambes. Elle remue un peu la main.
   Il défait enfin la brassière. Il est agile, mais elle devine encore dans ses gestes de la maladresse, un peu de cette gaucherie qu'il a toujours gardée et qui est un piment dont elle ne se lasse pas. Il l'a plaquée fermement mais sans brusquerie contre lui et ses mains dans son dos ont trouvé la bride et défait l'agrafe. Le tissu, inutile désormais, glisse le long d'un bras, puis tombe de l'autre.
   Il n'y a pas de jaillissement, pas d'explosion. Pas d'apparition. Le seins sont là, devant lui, ils sont là et il les prend doucement, doucement, comme pour les habiller encore un peu, il les prend et se penche, les embrasse. Les baisers délicatement sonores claquent sur la peau blanche, la langue caresse, les mains prennent. Elle dit peut-être « oui ». Elle ne dit sûrement rien. Il a le sens de la justice. Les deux seins reçoivent autant. Il les titille, les agace. Elle sourit, elle rit, la main toujours entre ses cuisses. Elle n'a aucune envie de l'ôter. Elle n'enlèvera cette main que pour laisser la place à celle de l'homme. Elle bouge. Elle ouvre les yeux. Il est face à elle, debout, presque droit, vaillant, les lèvres encore humides de ses seins gonflés. Ils se regardent un instant, une trêve. Il pose alors un baiser sur ses lèvres tièdes, affolées, un baiser rapide à l'odeur de peau, l'odeur de sa propre peau, l'odeur de sa poitrine. Il pose ce baiser et elle tombe sur le lit.
   Rires !
   Regards !
  Ce haut nu, doré presque uniformément, barré du blanc laiteux des seins, la main au creux des cuisses. Elle voit qu'il voit, elle rougit, ce n'est pas la première fois, loin de là, ce n'est pas la première fois que sa main, sa main à elle, que ses cuisses, que sa main sur ses cuisses, entre ses cuisses, ce n'est pas  la première fois qu'il la voit ainsi, qu'il la surprend, ce n'est pas la première fois mais elle rougit toujours. Elle va pour enlever sa main, elle va le faire, mais un mot, un murmure, « non », et une main d'homme qui replace une main de femme entre des jambes chaudes.
   Il la contemple. Elle est allongée sur le dos, étendue, intimidée. Seules les jambes, du genou au pied, pendent du lit au sol. Il est debout, entre les jambes écartées de la femme. Il la contemple. Il la contemple.
   Qu'elle est belle ! Gracieuse et pleine, un corps qui invite, un corps qui inspire des choses à l'homme qui la regarde, un corps qui s'abandonne et qui donne.
   Il s'agenouille et pose sa tête entre ses cuisses, sur sa main à elle qu'il sent remuer contre sa joue. Il touche les seins, le ventre tendu, il parcourt la peau nue, les côtes légèrement saillantes, et il s'attarde dans le creux formé, cette dépression presque imperceptible qui le mène au nombril, qui le fait glisser vers la lisière du pantalon.
   Il respire fort, il est au cœur de l'univers, il respire fort, enivré d'odeurs de jambes, de cuisses et de sexe, il respire fort et les parfums l'assaillent, exhalés par cette main qui ne cesse de remuer fébrilement, il respire fort, elle souffle, s'essouffle et ils disent à deux le désir d'être.
   Il embrasse la main. Il lèche les doigts qui s'agitent. Elle met sa main libre sur les cheveux de l'homme, lui plaque la tête entre ses cuisses, elle ne le lâchera plus, il monte, elle plonge.

   Il a trouvé les boutons du pantalon et, aveuglé, il défait l'ouverture qui se détend d'un coup sec. Hello Kitty ! Un triangle de tissu clair apparaît, qu'il ne voit pas encore. Elle a maintenant les deux mains sur la tête de l'homme et elle le guide, le remonte un peu, sur le pantalon ouvert, sur les bobettes mouillées.
   Il vit. Il bande comme jamais il n'a bandé. Il est tout, il n'est rien, minable et majestueux, il va la prendre, elle va le prendre et ils vont faire les fous, exclusivement, ils vont rouler sur la pente, dévaler, ils vont s'aimer de nouveau.
   Il se repaît, bête sauvage et affamée, des délices aphrodisiaques. L'odeur est puissante, il ne sait plus s'il a déjà respiré cet air-là, oui pourtant, souvent, il s'est retrouvé là, entre les cuisses de la femme, la tête immergée, souvent, si souvent, c'est chez lui dit-elle, chez lui, chez toi mon amour et personne d'autre n'y viendra, il respire, il inspire, c'est le parfum de la forêt et du grand-monde, le musc lourd et capiteux qui dérègle les sens. Il veut retenir en lui toutes ces odeurs, il ne veut pas lutter, il veut succomber.
   Il lèche et mordille le tissu; elle s'agite, se cabre, se tend. Elle ondule au gré de sa langue et des lèvres. Elle appuie de ses mains, elle soulève les fesses, et il continue à lécher, et le coton bientôt ne fait plus qu'un avec la chair, la langue s'enfonce dans le sexe avec le tissu. Elle râle quand elle le sent en elle et il n'arrête pas, jamais rassasié de cet amour-là, sa tête va et vient, sa bouche fouille et ses mains saisissent le pantalon de chaque côté, et bientôt il glisse, et tout se noue, tout se joue, imbriqué, inextricable, tout se passe en même temps, elle relève ses jambes, met les pieds sur le lit, se soulève, il écarte sa tête le temps d'ôter le pantalon et il n'y a plus rien, plus rien que la culotte, trempée, presque invisible, et il remet sa tête, sa bouche, sa langue là où elle doit être, là où elle n'a pas fini d'être.
   Il se relève enfin, échevelé, les lèvres rouges, humides, la langue gourmande, il est essoufflé, il est heureux ! Elle sourit aussi, allongée, presque hagarde, mais ses yeux disent encore, elle cherche l'homme de ses mains, mais ne rencontre que le vide, il est trop loin. Il la regarde. Il regarde sa blonde.
   Il tend la main, se penche et caresse les cuisses. Il descend jusqu'au genou, remonte aux hanches, redescend par l'intérieur des cuisses. Il s'attarde, c'est si chaud, si serré. Elle écarte les jambes, lui laisse de la place, et les parfums remontent, étourdissent l'homme qui chavire, ferme les yeux, caresse encore, gestes désordonnés, il caresse encore et se rapproche du centre, de l'origine, il se rapproche, tourne autour, risque un doigt sur la soie des poils, risque un doigt, qui glisse, s'immisce sous le tissu, et il sent la chair, les lèvres gonflées et mouillées, le sexe qui lui dit viens, la peau un peu dure, tendue, couverte de fins poils, il sait tout ça, mais il tremble et son doigt s'enfonce dans son sexe, sa chatte magnifique, ouverte et glissante, il s'enfonce, elle se cambre et l'accueille.
   Il rapproche sa tête pour lécher l'intérieur des cuisses. Il retire son doigt, doucement, elle soupire, non, elle gémit, pourrait pleurer, supplier, elle lève un peu la tête, ce n'est pas facile, pas confortable, elle le regarde, que fait-il, où va-t-il, elle le voit lécher ce doigt qui était en elle, elle le voit enfoncer ce doigt dans sa bouche comme dans son sexe ! Elle se laisse retomber suffoquée d'excitation.
   Elle soulève encore plus ses fesses, les pieds toujours sur le lit, les jambes repliées. Il a compris, il l'écoute. Il enlève la culotte qui roule le long des jambes, il la bouchonne dans sa main droite et la porte à son nez. Il respire comme on prend une dose, il ferme les yeux, et le monde disparaît.
   Étourdi il replonge la tête dans le sexe de la femme.

   O qui dira l'extase ? Qui dira le coup au cœur, qui dira le boum boum, l'agitation insensée, la secousse sismique ? Qui dira le voyage, l'au-delà, qui dira la plénitude ? Qui dira la certitude ?
   Il pleure. Si fort, si bon. C'est tellement ce qu'il attendait, ce qu'il espérait, c'est le rêve et la réalité, c'est le monde dans sa bouche. Il pleure dans ces cuisses, nourri d'odeurs, de jus et de bonheur retrouvé.
   C'était toi mon amour, c'était toi et personned'autre.
   Et sa langue poursuit sa quête; elle n'a plus d'obstacle, plus de tabous ni de limites, sa langue est à elle et il écarte de ses mains les cuisses, et le sexe s'ouvre, et la chatte se découvre, luisante, parfumée et sa langue se pose, du bout, au bord, et il lèche, il lèche les poils, courts, doux et les mains de sa belle sur sa tête, appuient, le descendent, le remontent, le retiennent, oui là, non, oui, aussi, un peu là, pas trop, si, encore, encore plus.
   Il écarte les lèvres davantage. Sa langue la pénètre. La terre nourricière l'accueille et il ne se contient plus. Il aspire, il avale, il suce, il mouille, il lèche à n'en plus finir, avide et tendu. Elle s'agite, elle tombe, elle croit qu'elle va perdre connaissance, c'est si haut, si fort, elle tombe encore une fois, et une troisième fois, dix fois, vingt fois, elle tombe et revient, elle chavire, elle tangue, elle s'accroche à lui, des mains, des cuisses, du sexe, elle s'accroche et ensemble ils naviguent, sans crainte aucune, la tempête mais pas le naufrage, la tempête et le bateau qui roule, gronde, se penche dangereusement, la tempête et le plaisir en elle, en lui. Sa langue souple, sa langue qui la connaît si bien, sa langue est en elle et le frisson monte, parcourt le ventre, les seins, la gorge.
   Il continue à lécher, sevré qu'il était, incapable encore de s'arrêter. Elle le freine, voudrait soulever sa tête, mais il insiste, il n'a pas fini, il veut encore de cette chatte brûlante, tout à lui maintenant, il veut encore repartir et elle ne sait plus rien de l'ombre, du noir, de la grisaille, elle ne sait plus rien des déserts qu'il a fallu traverser, des torrents remontés, elle ne sait plus rien de tout cela qui la minait, elle est avec lui qui est en elle, elle est à lui et c'est l'éternité qui l'appelle.
   Elle parvient enfin à lui retirer la tête de ses cuisses. Elle tremble, elle s'est forcée, elle ne voulait pas, mais elle voulait tant, elle tremble dans son sourire, oh ce sourire ! intime, invisible aux autres, ce sourire extatique, ce sourire plein de sexe. Il tremble aussi, il tremble dans son regard lumineux, mouillé, reconnaissant et agité. Elle reprend la tête de l'homme entre ses mains et se relève, s'assoit, quel effort, quel effort !, se penche. Elle l'embrasse. Elle grimace. C'est elle qu'elle embrasse, c'est elle en lui. Elle ne connaît son odeur, son goût, que par lui, que par cet homme qui la lèche. Elle n'aimait pas cela, elle n'aime toujours pas, mais elle le veut, aujourd'hui et les autres jours, elle le veut. Ce goût c'est elle et c'est lui, ce goût c'est eux, l'unique eux, c'est l'amour, le sexe, le don, c'est ton corps et mon corps pour toujours mêlés.
   Elle l'embrasse.
   Il va s'évanouir, il le sent, ça ne peut être autrement, ça ne peut plus tenir, où irait-il chercher tout le souffle nécessaire, toute la force pour résister encore ? Il sent ses mains, ses seins durs. Il sent la chatte sous ses doigts qui la caressent, la pénètrent. Il l'aime, il l'aime et ne s'évanouit pas, il reste au bord de cette vie, ce bord qui est l'amour fragile, l'amour total, absolu, l'amour de tout, l'amour qui peut rompre à tout moment, et le désir, pour l'heure, les soude l'un à l'autre, et le baiser se prolonge, il devient sauvage, appuyé, goulu.
   Elle se redresse sur le lit, assise. La tête de l'homme est sur ses cuisses chaudes. Elle le prend par les épaules, le soulève un peu et il l'aide, il comprend, se relève. Il est devant elle, immense, habillé, il est debout et il bande sous les yeux de cette femme.
   Elle met sa main sur le pantalon, sur la braguette gonflée. Elle éprouve le sexe bandé de l'homme, elle le caresse, le moule, elle donne des baisers sur la toile bleue, elle ouvre la bouche et parcourt la queue tendue, si dure, elle y pose ses lèvres et le sent vivre.
   Il a fermé les yeux. Il est sous l'emprise de la femme, de sa bouche, de ses mains, de ce souffle chaud qui le pique. Il caresse ses cheveux, c'est presque un geste de retenue, ne pas partir, pas encore, pas déjà. Il a les yeux fermés mais il la voit pourtant, il la rêve. Il se dit qu'elle pourrait, oh oui qu'elle pourrait, elle pourrait mon Dieu ! défaire son pantalon, le laisser tomber, attraper sa queue par l'ouverture du boxer. Elle pourrait le saisir d'une main, le serrer, le faire saillir, elle pourrait l'engouffrer en elle, dans sa bouche, le faire aller, le faire venir, elle pourrait le sucer, le sucer, elle pourrait.
   Et les gestes de la femme qui caresse, qui excite toujours son sexe à travers le pantalon, font prendre corps aux images, aux ivresses exaltantes, intenables. Il imagine, il anticipe et c'est bon, il sait que c'est aussi cela le plaisir, que la réalité tout de suite, tout à l'heure, demain, la réalité rattrapera les images, dépassera le rêve, il sait qu'il y aura la main, la bouche, le corps de cette femme, il sait que ce sera plus fort, plus douloureux et qu'il pleurera.
   Elle défait la ceinture. Fébrile. Elle dégrafe les boutons de la braguette. La forme se tend, jaillit presque. Des deux mains elle fait glisser le pantalon et le boxer en même temps. Elle a fait attention à ne pas heurter le sexe bandé, à écarter le textile pour passer au-dessus. Il soulève un pied, puis l'autre et le pantalon tombe au sol, fini. Il n'attend pas, il enlève son tee-shirt, il sera nu pour elle, face à elle, sur elle, peau contre peau, livré à elle sans rien qui pèse ou qui pose, il est nu, seul un bracelet de cuir tourne autour de son poignet, cadeau d'elle qu'il ne quitte jamais. Il est nu, debout et son sexe se dresse, rouge et fier, gros pense-t-elle.

   Elle le prend dans ses deux mains, caresse les testicules, les poils roux et longs. Elle le tient dans sa main, le sent lourd, vivant, elle le sent qui palpite dans ses mains, le gland débordant, elle sent cette queue vibrer, la désirer, elle sent le sexe de l'homme, le plaisir bientôt en elle. Elle embrasse le bout, elle parcourt la hampe solide, droite, elle soulève la queue pour lécher dessous, là où la peau est plus tendue encore. Son odeur, l'odeur de son amour, la transporte. Elle ferme les yeux, inspire tout ce désir incarné dans ce sexe offert. Elle donne de petits coups de langue tout autour, elle s'attarde dans les poils qu'elle mordille, qu'elle tire un peu, qu'elle goûte et caresse de la bouche et des doigts.
   Elle a mis une main sur ses fesses. Il s'est contracté. Elle le lèche toujours, elle ouvre les yeux, lève le regard. Elle le voit, abandonné, à sa portée, soumis, sans défense, nu, elle le voit si bien son amour, elle le voit tellement, tout entier avec elle. Il a toujours les mains dans ses cheveux. Il ne force pas, ne plaque pas, ne guide pas. Il la caresse et elle frissonne.
   Elle le happe. Elle prend un peu plus fermement le sexe et le met dans sa bouche. D'abord le gland. Elle suce, elle aspire, elle embrasse, elle caresse de ses lèvres fermées, elle sent la peau sensible, granulée. De sa main elle dégage un peu plus le sexe et l'enfonce dans sa bouche.
   Meurt-il ?
   Est-il toujours cet homme, cet humain qui pouvait marcher, travailler, parler ? Est-il toujours de ce monde ?
   Il est tout entier, croit-il, en elle, dans sa bouche. Elle le fait aller et venir. Il sent tout, la bouche, les lèvres serrées autour de sa queue, la langue qui caresse, qui tape au gré des mouvements. Il sent la main qui branle, qui imprime le rythme parfait, celui de l'amour, du plaisir qui vient, de la jouissance qui naît.
   Ça pourrait finir.
   Ça pourrait vraiment finir, là, dans sa bouche, sur sa langue, contre ses joues, au fond de sa gorge, noyé dans ce mouvement régulier, perdu dans les yeux de cette femme qui parfois s'ouvrent et s'élèvent vers lui, le regardent et le font bander toujours plus, ce regard qui branle, ce regard qui caresse en même temps que les lèvres serrées entre lesquelles il va et vient. Ça pourrait finir. Sans retenue, sans calcul, ça pourrait finir.
   Mais il la veut encore. Il la veut autrement et davantage. Ensemble, au bout, tout au bout.
   Il se force alors, une volonté, un titan, il s'arrache à la bouche promise, il se recule et il sent sous ses mains, son sexe qui frôle ses joues, les déforme et sort enfin. Ça claque, elle respire. Elle n'arrête pas de le caresser, doigts pressés, autour de sa queue droite, imbibée d'elle et de lui. Il la regarde. Ses lèvres suintent l'amour, elle embrasse le gland, coups de langue, encore, et encore, elle voudrait qu'il revienne, qu'il reste, elle n'est pas rassasiée, elle le veut, en goût et en chaleur. Il recule encore. Le sexe échappe alors aux mains de la femme.
   Elle tombe sur le dos.
   Il se couche sur elle.
   Elle remonte sur le lit, s'y étend de tout son long.
   Son corps à lui, le corps de son amant, le corps de son amour, le corps de sa vie toute entière, son corps est sur elle, la suit, rampe, rivé à la falaise, au bord du vide, mais ancré, si solidement, si solidement qu'il sait, qu'il a la certitude, que rien jamais, que rien ne lui arrivera de fâcheux.
   Ils sont nus.
   Ils sont deux.
   Ils sont beaux.

   Ils mouillent et ils bandent et on ne sait plus qui, on ne sait plus quoi, ni maintenant, ni demain, ni pourquoi, ni comment, ils sont nus et sa bouche à lui est sur sa bouche à elle et ses seins, son torse, son sexe encore, son sexe, les cuisses, les jambes, les peaux, tout se touche, tout se parle, tout se reconnaît, je suis là, je suis là mon amour, c'est moi, tu te souviens, tu te rappelles, c'est moi mon amour et toi et moi, et toi en moi, mon amour, viens. Il roule sur le coté droit. Il la tient, il est fort, elle ne peut que suivre, elle veut suivre, il la tient, il l'entoure, elle bascule aussi. Ils ont les yeux dans les yeux, de profil, bouche contre bouche. Il a mis ses mains sur son visage, il dégage un peu les cheveux, il veut l'embrasser, il ne se lasse jamais de sa bouche, il l'embrasse, sur les lèvres, sur les joues, dans le creux du cou, elle frissonne, elle rit, il embrasse l'oreille, elle frémit, rires encore, elle voudrait se dégager, non, elle ne veut plus, continue, continue, elle gémit, elle n'en peut plus, elle n'en peut plus, il n'en peut plus, si, encore, encore, n'arrête pas, continue !, ses mains, ses mains à elle, sont sur ses hanches, sur ses fesses. Elle sent le galbe, rebondi, ferme, et ses mains caressent la chair secrète et ses doigts passent, s'attardent, pénètrent presque dans la crac, la faille, son endroit à elle. Il se raidit. Elle le tient, le possède. La folie rode, le moment où vont s'abolir l'espace et le temps, l'amour même, la vie peut-être, ce moment où il n'y aura rien d'autre qu'elle et lui, que toi et moi, fondus, ce moment où ni demain, ni même aujourd'hui ne voudront rien dire, où les chemins se terminent, où la révélation apparait, ce moment où il ferait si bon mourir. La folie guette. Il prend sa cuisse, la soulève. Il la pose sur sa propre hanche. Il agrippe ses fesses, les rapproche de lui, la plaque contre son corps, et ils s'entremêlent, et les duvets se confondent et s'unissent.

   Il bande contre elle, contre son sexe. Ils ne respirent presque plus. Elle glisse une main entre eux, une main miraculeuse qui se faufile, elle glisse cette main et saisit la queue de son amour, elle la prend, la serre, elle sent l'ivresse, le désir urgent, elle sent l'homme qui sent la femme, elle sent le sexe soumis et le dirige vers son sexe, vers sa chatte humide, ouverte, elle le guide et il se laisse faire, elle le guide et le pose en elle, au bord de son sexe et il sait, il l'aime, il l'aime tant, il la connaît, il est venu si souvent, mais encore, encore et encore, il veut, il sait, il veut et vient, il avance un peu, doucement, ils se regardent, les bouches entrouvertes, le souffle suspendu, ils attendent, ils savent tant de choses, l'évènement, ils savent, ils attendent, ça va être là, ça va être toi, ça va être moi, ils savent, ils veulent attendre encore, savourer, t'embrasser mon amour, et il pénètre en elle, il s'enfonce, il entre, encore, encore, un peu plus, toujours plus et un coup sec, un tout petit coup sec, et elle lâche un cri, surprise, et ses yeux aussi crient et lui, oh lui, en elle, il rit, il a toujours rit en elle, il est si bien, il est si beau, elle s'accroche, elle se tient à lui, elle ne pourra jamais tomber, il ne la laissera jamais tomber, elle s'accroche à lui, elle remue, il s'agite, il l'embrasse, elle ferme les yeux et plus rien ne peut être dit.

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